Nous apprécions toujours quand des médias parlent de nous, qu’importe la plateforme. Nous avons la conviction que nos aventures – surtout l’expédition AKOR 2021 – inspirent les gens et contribuent à accroitre les connaissances du public sur les régions nordiques.
Toutefois, il est crucial de rester conscient que cet effort d’éducation peut rapidement être contrecarré par l’utilisation d’un vocabulaire journalistique en décalage avec ce que nous promouvons.
L’Arctique canadien, avant même d’être un lieu géographique, est le territoire ancestral du peuple Inuit et de ses cultures ancestrales (pré-dorsetienne, dorsétienne et thuléenne). Cette région, occupée depuis des millénaires et aujourd’hui plus que jamais, se nomme Inuit Nunangat. Ce nom est signifiant et il importe de l’utiliser.
Le Nunavut est un territoire politique – et un toponyme identitaire – créé en 1993, au sortir d’une négociation et d’une organisation effective des Inuits envers le gouvernement fédéral pour obtenir une autonomie et un droit d’autodétermination qui leur avait été refusée – et ignorée – depuis toujours. Bien que des progrès politiques aient été réalisés dans les 30 dernières années, beaucoup reste à faire.
Nous reconnaissons les luttes des sociétés Inuites du Canada dans leur longue marche vers la décolonisation culturelle et institutionnelle.
C’est pourquoi nous encourageons les journalistes à user d’un vocabulaire qui va également dans ce sens. Lorsqu’on traite du Nord et de l’Arctique sur la place publique – les médias en font partie-, certaines notions sont à garder à l’esprit :
1. Le « Nord » est nordique pour nous, qui habitons le sud du Canada. Or, pour les Inuits, ce n’est pas le « Nord », mais plutôt leur milieu de vie normal, auquel ils sont parfaitement adaptés et qui est partie intégrante et indispensable de leur identité.
2. L’Arctique canadien n’est pas cette région vide, lointaine, inconnue, perdue, inhabitée, vierge, sauvage et hostile à laquelle on fait trop souvent référence. On ne devrait pas non plus définir l’Arctique simplement comme étant la région située au Nord du 66e parallèle ni comme la limite des arbres et du pergélisol. Cette région est avant tout l’Inuit Nunangat, territoire des gens qui y vivent et qui bénéficient de droits particuliers reconnus par l’État selon leurs conventions. L’Arctique est habité depuis des temps immémoriaux, est confortable pour les Inuits et est au cœur de leur magnifique culture.
Suivant cette logique, quelques termes et champs lexicaux – trop rependus – sont à éviter, pour éviter de connoter négativement l’expédition que nous faisons, et pour cesser de perpétuer la vision négative et réductrice des Canadiens et Canadiennes envers les Inuits.
– Conquête, conquérir, possession, posséder, dompter, triompher, domination, dominer, venir à bout, vaincre, victoire, gagner;
– Sauvage, hostile, vide, vierge, désolé, inoccupé, inhabité, survivre, subsister, persister, résister.
Termes et champs lexicaux à privilégier :
– Traverser, arpenter, skier, pagayer, explorer, découvrir, aventure, périple, imprévu, risque, atteindre, rallier, relier, s’adapter, s’acclimater, obstacles, résilience, coopérer, collaborer, écouter;
– Nunavut, Inuit Nunangat, Haut-Arctique, Bas-Arctique, archipel, culture Inuit, autochtones, communautés inuites, région de Quikiqtaaluk, cordillère Arctique, Ellesmere, Baffin, passage du Nord-Ouest.
Merci de votre collaboration et de votre sensibilité à l’important enjeu du prisme médiatique dans les représentations du Nord et des cultures autochtones.